1114_Yoni-Saada_BagnardYoni Saada, le chef de Miniatures, a décidé de s’attaquer à la cuisine du Sud, et même ai-je envie de préciser, à la cuisine niçoise. Mais pas celle de restaurant, non. Celle que l’on trouve normalement à la boulangerie du coin mais qui n’existe pas à Paris, avec comme figure de proue la pissaladière et surtout le pan bagnat.

Je vais l’avouer, je suis réticent de nature à ce type d’idées. Étant niçois, j’aime bien l’idée de garder l’exclusivité de certaines recettes pour le Sud. Il y a un vrai plaisir de les retrouver uniquement en bas, à chaque passage. Et comment un parisien pourrait les apprécier, non mais!? Reste que la curiosité étant plus forte, je devais vérifier si Yoni Saada avait respecté les bases, ou si c’était juste un délire gustatif d’artiste. Il faut dire qu’encore tout récemment, j’avais vu un « Pain bania » dans une vitrine de ma ville. Mes yeux en ont saigné des larmes d’huile d’olive extra vierge de tristesse.

PainBaniaLe point essentiel du pan bagnat, c’est sans doute le pain! Il est rond, bombé, et ne se trouve vraiment que dans le Sud. Jusqu’à présent je n’ai vu que des imitations de mauvaise qualité, même chez de bons boulangers. Et il doit aussi être bien imprégné d’huile. Sur les premières photos en provenance de Bagnard, j’avais un doute sur le bon respect de ce pain qui me semblait plat. Il fallait vérifier. En arrivant, mauvaise nouvelle, il n’y a plus de pain. Mais une fournée va bientôt arriver. Et effectivement, quelques minutes après nous voyons entrer en boutique Yoni avec une cagette de pains ronds et frais. Les choses sérieuses vont commencer.

La carte propose 4 recettes : Lulu l’authentique, Brigitte la veggie, Charlot la barbac, Dédé la sardine. Un Lulu et un Charlot vont nous accompagner pour ce repas. Il ne leur faudra que quelques minutes pour être préparé et arriver coupé en deux dans un emballage papier. Il est à noter que habituellement un pan bagnat n’est pas servi coupé, mais cela permet de voir les ingrédients. C’est une touche personnelle qui ne dérange nullement, j’espère juste que les maisons du Sud ne vont pas s’en inspirer pour nous la rejouer grand chic comme avec la socca en tranches il y a quelques années. On garde nos traditions locales chers restaurateurs !

1114_Yoni-Saada_Bagnard_7Le papier est légèrement translucide par endroit, signe que l’huile a bien imbibé le pain. Mes petits doigts s’imprègnent aussi d’huile pour mon plus grand bonheur (ce n’est pas le cas pour tout le monde ^^), je mords dedans et… œuf, olives, thon, mesclun… les ingrédients sont bien là et le verdict est sans appel : le goût est authentique ! Niçois approuved ! Le pain supérieur est peut être un peu moins épais que pour des pan bagnat du sud, mais au final cela laisse plus de place au goût des ingrédients qui sont bien choisis. Ils sortent d’ailleurs par les côtés, comme le veut la coutume. Ce n’est pas un défaut d’homologation des pains, c’est normal on vous dit ! ;-)

La vraie recette est la Lulu. Notez que lorsque je dis « la vraie », on pourra y trouver à redire, mais il existe de nombreuses légères variations selon les goûts de chacun, les recettes de famille… Yoni Saada a aussi créé des recettes inédites qui utilisent les pains traditionnels. Le Charlot la barbac annonce par exemple « cecia de thon, moutarde Piccadilly, riquette, oignons caramélisés, champignons. On est dans un univers différent, avec entre autre une moutarde piquante qui change du goût habituellement doux. Si vous désirez découvrir un pan bagnat, vous ne pouvez prendre ces recette, seule la Lulu s’impose. Si vous connaissez déjà, c’est une bonne façon de revenir chez Bagnard en évitant la routine.

1114_Yoni-Saada_Bagnard_8Si le pan bagnat est à Bagnard ce que la méditerranée est à Nice, une raison d’être, on y trouve d’autres bonnes choses. Il y a par exemple une très excellentes salade de légumes du midi marinés. La célèbre pissaladière est aussi à la carte, mais il n’y en avait plus lors de notre passage. En dessert, le cheese cake est à conseiller. Je le préfère à la ganache gianduja alors que tout ce qui touche au chocolat a normalement mes faveurs.

« Cantines méditerranéenne », c’est comme cela que Yoni Saada sous-titre son établissement, et cela lui va bien. C’est un lieu où l’on prend ses aises, ses habitudes, avec une goût de reviens-y. C’est un vrai petit coin de Sud presque perdu dans Paris. Et à défaut de l’exclusivité du pan bagnat, j’aurai toujours le plaisir à en manger un assis sur une chaîne bleue, sous le soleil, face à la mer. Ça c’est chez nous, et nulle part ailleurs.

Informations pratiques :
Bagnard – 7 rue Saint Augustin – Paris 2Du lundi au samedi : 11h-17h (et oui, fermé le soir!)
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